Qui es-tu, comment es-tu arrivé dans le produit ?
Alexis
Je m’appelle Alexis et j’ai 29 ans. Mon parcours dans le milieu du Produit s’est construit petit à petit, passant de Project Manager à Product Owner avant de devenir Product Manager.
J’ai découvert le monde de la tech et la gestion de projet lors de mes études en MIAGE, notamment à travers deux alternances dans le secteur bancaire. Cette formation m’a donné des bases solides dans de nombreux domaines concrets tels que le développement, la data, le droit, l’économie et la gestion, ainsi que dans des domaines théoriques tels que la stratégie d’entreprise et la gestion des systèmes d’information.
Après mes études, j’ai commencé en tant que Project Manager chez Shift Technology, une licorne dans le domaine de l’Insurtech, où j’ai travaillé sur la mise en place de systèmes de détection de fraude pour des assurances santé.
C’est à ce moment-là que j’ai commencé à travailler sur du Produit sans vraiment m’en rendre compte. En effet, ayant été chargé de mettre en place un nouveau type de détection et de traitement de nos alertes, j’ai dû commencer à réfléchir à de nouvelles interfaces, de nouveaux processus, le tout en prenant en compte le persona du gestionnaire d’alerte. Ce projet a été comme un déclic qui m’a permis de me rendre compte que c’était le genre de choses que j’avais envie de faire.
Je me suis ensuite lancé dans une aventure entrepreneuriale où j’ai pu expérimenter plein de concepts Produit : faire des études de marché pour déterminer son persona, réaliser des entretiens utilisateurs, concevoir des interfaces et des interactions, avoir une vision impactante… Dans le même temps, j’ai suivi une formation pour me spécialiser en Product Management et j’ai commencé à chercher un travail dans ce domaine.
J’ai commencé en tant que Product Owner pour un SaaS de gestion de recrutement, où j’ai pu mettre en pratique toute la partie delivery et gestion de la relation avec les développeurs. Ayant envie de passer à un poste plus global et de m’attaquer à la partie plus stratégique / discovery, j’ai changé d’entreprise pour rejoindre moka.care.
Le choix de moka.care a été simple car il correspondait à toutes mes aspirations du moment :
- Un rôle de Product plus complet avec de la Discovery et du Delivery
- Une petite équipe mais déjà bien en place dans laquelle j’allais pouvoir avoir un impact mais surtout apprendre.
- Une entreprise avec une mission inspirante et qui résonnait avec mon parcours.
Tu as commencé en tant que PMO — chef de projet, quels sont les apports de ce métier sur ton poste de PM ?
Alexis
Je dirais que ces métiers m’ont apporté trois choses qui me sont utiles au quotidien dans mon rôle de PM :
- une expertise du delivery Nous sommes aujourd’hui à l’ère de la discovery dans le Product, et on semble oublier que l’une des compétences fondamentales d’un PM est de savoir gérer le delivery (cf. article de Rémi Guyot). Ces années en Project Management m’ont clairement permis d’apprendre à gérer le delivery d’un projet : prioriser, anticiper, réagir aux imprévus, re-scoper, créer une relation avec des équipes tech…
- une appétence tech/IT : dès mes premières expériences en Produit, je me suis rendu compte que mon passé en gestion de projet informatiques m’apportait à la fois une crédibilité et un langage commun avec les développeurs qui simplifie la relation au quotidien. Quand tu arrives dans une équipe avec des développeurs bien en place, le fait qu’ils n’aient pas besoin de traduire ou simplifier pour communiquer avec toi aide à te faire accepter et à créer la relation de collaboration saine dont on a besoin.
- une habitude dans la gestion de la complexité : quand tu as été habitué à gérer des projets au long cours avec de nombreux interlocuteurs comme chez BNP Paribas ou à mettre en place des Web Services et des VPN avec de grosses assurances comme chez Shift, plus rien ne te fait peur en termes de complexité. Ce qui te permet après, en tant que PM, d’aborder plus sereinement certains sujets dont tu n’es pas expert.
Comment s’est passée ta transition dans le job de PM ?
Alexis
Grâce à mon expertise en delivery, ma transition s’est plutôt bien passée car j’ai pu me concentrer sur l’amélioration de mes compétences dans différents aspects de la discovery, tels que la formulation de problèmes, l’analyse de marché et de persona, et la recherche utilisateur.
La grande inconnue lors de ma transition en tant que PM a été d’apprendre à travailler avec de nouveaux types d’interlocuteur.ice.s tels que des Product Designers, des Product Marketing Managers ou des Product Content Managers.
Ce sont des métiers avec lesquels je n’avais pas du tout l’habitude d’interagir au quotidien, dont la définition est propre à chaque entreprise, et il m’a donc fallu un peu de temps pour trouver mes marques.
Tu as travaillé en tant que Health Fraud Project Manager, en quoi bénéficier d’une expertise sectorielle métier t’aide au quotidien ?
Alexis
Bien que je n’utilise plus cette expertise sectorielle au quotidien, elle m’a appris à explorer un sujet et à rester curieux en tout temps.
Quand j’ai commencé dans le secteur de l’assurance santé, je n’y connaissais rien et j’ai du apprendre rapidement pour être en capacité de gérer mes projets. Lors de mes réunions clients, je passais mon temps à prendre en notes tous les termes et acronymes qui m’étaient étranger et à faire des recherches une fois revenu au bureau. C’est cette capacité à apprendre vite et à m’adapter à un domaine que je ne connais pas qui me sert le plus au quotidien.
Quand on te demande de travailler sur un funnel de réservation de rendez-vous ou l’optimisation du taux de feedback alors que tu n’as jamais fait ça auparavant, tu n’as pas d’autre choix que de creuser, regarder ce qui se fait ailleurs et apprendre.
Comment s’est passé ta première expérience en tant que PO et qu’as-tu appris sur le métier ?
Alexis
Ma première expérience en tant que Product Owner pour un SaaS de gestion de recrutement a été très formatrice et m’a beaucoup apporté, tant sur des aspects positifs que négatifs :
- J’ai rapidement établi une relation de confiance avec les développeurs, ce qui m’a rassuré quant à ma capacité à gérer une équipe au quotidien, à animer les rituels, les motiver et à savoir dire les choses qui ne vont pas. Cela m’a donné un petit coup de pouce de confiance toujours agréable lorsque l’on est en situation de “reconversion”, ce qui peut engendrer un léger syndrome de l’imposteur.
- J’ai rapidement compris que je ne voulais pas me contenter du rôle de PO et que je voulais pouvoir participer à la stratégie et à la vision des fonctionnalités dont j’étais responsable. Ce qui m’a frustré dans ce rôle, c’est devoir livrer une fonctionnalité dont je n’ai pas participé à la conception et à laquelle je ne crois pas forcément. Cependant, cela m’a permis de réaliser rapidement que je voulais devenir PM pour combiner la découverte et la livraison.
Maintenant chez moka.care, comment s’est passé la transition vers le poste de PM ?
Alexis
Chez moka.care, j’ai appris et j’apprends à être un PM. Je pense que j’avais de nombreuses compétences qui sont nécessaires pour être un PM, mais je ne les avais jamais assemblées auparavant.
J’ai eu beaucoup de chance de rejoindre une petite équipe chez moka.care, où je peux toucher à de nombreux sujets et apprendre énormément tout en étant dans une entreprise déjà structurée.
Si je dois résumer mes apprentissages aujourd’hui, ils s’articulent autour de deux grands axes : les problématiques et les pratiques.
Les problématiques, car j’ai eu la chance d’être très vite onboardé sur un grand nombre de sujets que je n’avais jamais explorés auparavant, allant du taux de conversion d’un e-mail de feedback à la création de notre première offre standalone. Et à chaque cycle de discovery, je dois creuser une problématique différente qui me fait apprendre énormément. C’est l’avantage des startups assez early stage : on touche à énormément de choses, tout évolue vite et on voit rapidement l’impact de notre travail.
Les pratiques sont le fruit d’une relation équipe tech-produit assez inhabituelle, tant elle est saine et sans conflits. Cela est notamment dû à Shape-up, mais aussi à notre travail quotidien pour faire de cette relation une réussite. (cf. mon post linkedin sur le sujet)
Raconte-nous la genèse de la grande étude sur la santé mentale dans le produit faite par moka
Alexis
Pour remettre un peu de contexte, en janvier 2023, j’ai créé l’étude “Product & Santé Mentale” dont les résultats sont sortis en mai.
Nous avons lancé cette étude avec Eloïse (HoP moka.care) pour essayer de comprendre comment les Product Managers se positionnent par rapport à ce sujet : comment vont-ils ? Quelles sont leurs problématiques ? Sont-ils plus touchés ?
Les résultats ont confirmé quelque chose que Timothée Frin expliquait très bien dans l’un de ses posts : le métier de PM est compliqué et sa difficulté est souvent sous-estimée.
Quand on voit que plus de 75% des répondants estiment que leur santé mentale affecte leur productivité ou que 56% estiment que les équipes de production sont plus sous pression que les autres, on se rend compte que cette difficulté du métier de PM est ressentie par tout le monde.
Il y a un résultat qui m’a vraiment surpris : c’est le fait que, pour plus de la moitié des répondants, c’est la relation avec le management (deadlines, objectifs, etc.) qui a le plus d’impact sur leur santé mentale, et non pas la relation avec les équipes en contact avec les clients, qui, pour moi, devait logiquement arriver en premier.
L’étude n’a pas vraiment changé mon rapport au métier, mais je suis content d’avoir pu mettre en lumière ce sujet encore tabou dans notre domaine. Maintenant, la question est : qu’est-ce qu’on fait de ces résultats ? Comment pouvons-nous collectivement changer les choses ?
Concernant Peerz, quel était ton besoin lors de ta première rencontre ?
Alexis
Au début, j’ai beaucoup hésité à m’inscrire parce que j’avais peur de ne pas avoir grand-chose à apporter à la communauté et je ne voulais pas apparaître comme celui qui est toujours en demande.
Puis, j’ai été confronté à une problématique assez courante dans beaucoup d’équipes Produit : “Comment faire en sorte que les sales donnent des feedbacks ?”. Nous avions déjà pas mal brainstormé sur le sujet en interne, mais personne n’avait vraiment ni de retour d’expérience, ni d’avis tranché sur le sujet.
C’est là où je me suis dit que ce serait vraiment utile de discuter avec un confrère pour avoir un avis complètement externe.
L’échange s’est très bien passé. C’était très précieux pour moi d’avoir les retours d’un autre PM qui connaissait des contextes différents, avec qui j’ai pu brainstormer et qui a pu me challenger sur les choses que j’avais mises en place et celles que je prévoyais.
Comme on dit dans le produit, j’ai eu mon “aha” moment très rapidement et cela m’a donné envie de faire des rencontres régulièrement.
Qu’est-ce que t’apportes Peerz dans ton quotidien de PM ? As-tu eu des rencontres marquantes ?
Alexis
Même s’il y a une grande communauté de PM, parfois, au quotidien, on peut se sentir un peu seul avec ses problématiques. Et puis, même si j’aime lire des articles et écouter des podcasts, on a parfois envie d’avoir un regard extérieur et de pouvoir échanger avec quelqu’un sur le sujet.
De l’autre côté, c’est également très agréable de partager son expérience et son point de vue avec d’autres PM. Je trouve cela toujours super gratifiant quand je sors d’une rencontre où je sens que j’ai pu aider quelqu’un en lui apportant un regard nouveau.
Dans mes dernières rencontres, il y en a deux qui m’ont particulièrement marqué :
→ Une discussion sur l’engagement avec Laetitia Lourenco qui illustre bien les rencontres où tu sors ultra-nourri grâce au regard qu’on t’a apporté sur les choses et tous les conseils. Chez moka.care, l’engagement des membres est mon principal objectif et à ce moment-là, j’avais besoin d’ouvrir mes chakras sur le sujet pour résoudre une problématique de “Comment booster l’engagement sans être pushy car on parle de santé mentale”. La discussion avec Laetitia, plus que de me donner une recette (existe-t-elle vraiment?), m’a permis d’ouvrir ma réflexion et de me poser plein de questions qui me permettront de faire une discovery sûrement riche en apprentissage.
→ Une discussion sur la Product Led Growth avec Jana Frejova qui est un super exemple qu’un simple échange de 20 minutes peut être hyper impactant. Pour la première fois chez moka.care, nous allons lancer une offre en self-service et j’ai été chargé du projet. Bien que ce soit un sujet qui me passionne et sur lequel j’avais lu pas mal de choses, c’était un sujet très théorique pour moi. Le retour d’expérience de Jana et les ressources qu’elle m’a conseillées m’ont permis de me remettre un peu plus dans le concret et d’aborder ce projet stratégique plus sereinement.
As-tu un conseil à partager pour les échanges entre pairs ?
Alexis
Tout dépend de l’objectif de l’échange, mais mon conseil général serait de ne pas avoir peur de s’inscrire : nous avons tous des choses à nous apporter, quel que soit notre niveau de séniorité ou notre expertise. Et si c’est un échange où l’on est plus demandeur, il faut se poser en amont pour déterminer avec quoi on veut ressortir de l’échange et les questions que l’on souhaiterait poser.
Si l’échange est juste une discussion informelle, go with the flow. Nos quotidiens sont assez similaires, nous sommes confrontés aux mêmes problématiques : nous aurons toujours des choses à nous dire.
Pourquoi fait-on plus de peer learning dans le produit que dans d’autres métiers ?
Alexis
Je dirais que c’est assez multi-factoriel :
- C’est un métier encore assez nouveau qui demande un nombre de connaissances assez magistral et très matriciel : tu dois à la fois être expert du cœur de métier de ton entreprise mais aussi maîtriser des concepts de finance, de marketing, de tech, etc. Cela crée une nécessité d’apprentissage permanent qui fait que l’on se tourne plus facilement vers le peer learning, qui selon moi est la méthode la plus efficace pour apprendre.
- Comme je l’ai dit plus tôt, on peut vite se sentir seul en tant que PM et le peer learning permet de sortir de cette solitude.
- Aussi, c’est un métier compliqué au quotidien qui est presque une passion, et comme tous les passionnés, on aime partager notre passion.
Penses-tu que le quotidien des PMs va devenir plus bienveillant et apaisant ?
Alexis
En raison de la nature de notre travail, il est probable que cela reste un travail stressant et exigeant, car nous sommes au centre de toutes les décisions importantes.
Cependant, je suis optimiste quant à l’avenir, car je pense que les choses s’amélioreront lorsque le rôle des Product aura été mieux défini dans l’organisation.
Bien que la discipline soit ancienne aux États-Unis, elle est encore relativement nouvelle en France. Au cours des dix dernières années, elle s’est progressivement imposée, mais c’est ce processus qui rend notre quotidien parfois difficile.
Je pense que lorsque le rôle des Product sera aussi bien établi que celui d’un sales, nous travaillerons de manière plus apaisée. Aujourd’hui, en tant que Product, nous sommes souvent considérés comme des exécutants de demandes client-facing, des chefs de projets informatiques ou des scrum masters, car peu de gens, même dans les start-ups, connaissent notre travail.
Nous sommes des “pionniers”, et il est de notre responsabilité de faire évoluer les choses pour que notre quotidien et celui des futures générations de PM plus bienveillant et apaisé. Des initiatives comme la tienne peuvent aider à rendre cela possible.
C’est quoi pour toi la suite dans le métier de Product ?
Alexis
Très bonne question ! Mon avis sur la question a beaucoup évolué ces derniers temps.
Ce qui n’a pas changé, c’est mon envie de continuer à apprendre, à développer mes connaissances et mes compétences dans ce domaine si vaste.
Ensuite, comme beaucoup, j’ai longtemps cru que la meilleure voie était de devenir manager. Mais cette croyance est en train de changer, et c’est une évolution positive. Aujourd’hui, je pense que le management n’est pas adapté à tous et que ce n’est pas quelque chose qui me permettrait de m’épanouir pleinement.
Ce qui me passionne au quotidien, c’est d’avoir les mains dans le cambouis et c’est ce que j’ai envie de continuer à faire. Aussi, j’adore tout ce qui touche au sujet de Product Led Growth, qui est une discipline assez nouvelle, de plus en plus à la mode à l’ère où la croissance doit se faire de manière plus organique sans dépenser des millions dans de la pub ou des équipes sales surdimensionnés.
Donc pour moi la suite ce serait de rester contributeur individuel en développant une vrai expertise sur ce sujet.
Merci Alexis !
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